Nivolumab for Recurrent Squamous-Cell Carcinoma of the Head and Neck. R.L. Ferris, G. NEJM 2016

Le nivolumab, anticorps anti-PD1, inhibiteur du checkpoint immunitaire, a démontré un intérêt en phase I. Peut-il faire mieux que la chimiothérapie après échec d’un sel de platine ?

Il s’agit d’une étude de phase III. L’objectif principal de l’essai était la survie globale. Pour coller aux pratiques médicales, le nivolumab était comparé à une chimiothérapie au choix de l’investigateur : méthotrexate, docétaxel hebdomadaire ou bien cetuximab (non autorisé en Europe dans le cadre de l’essai car n’a pas d’AMM en monothérapie). Le nivolumab était administré toutes les 2 semaines à la dose de 3 mg/kg. Pour un HR visé de 0.70, 361 patients ont été randomisés sur un schéma 2:1.

Le nivolumab augmente de façon significative la survie globale qui passe de 5,1 mois avec la chimiothérapie à 7,5 mois avec l’immunothérapie (HR = 0,70; IC 97,73% 0,51-0,96 ; p = 0,001). Le taux de survie à 1 an est très augmenté et passe de 16,6 à 36%. Si la survie médiane sans progressions n’est pas augmentée à 2,3 mois, le taux de patients non progressifs à 6 mois est doublé, passant de 9,9% à 19,7%. Le taux de réponse est augmenté et passe de 5,8 à 13,3%.

La tolérance du nivolumab est bien supérieure à celle de la chimiothérapie puisque seuls 13,1% des patients traités par nivolumab ont présenté une toxicité de grade 3 ou 4 contre 35,1% avec la chimiothérapie.

Cet article apporte un nouveau standard en 2ème ligne dans les traitements des cancers ORL. Il a débouché sur une AMM aux Etats-Unis et gageons qu’elle arrive bientôt en Europe.

Il est important de noter dans cet essai que pour être inclus, les patients devaient avoir progressé dans les 6 mois après la dernière administration d’un sel de platine en situation de récidive. Ceci signifie que des patients ont pu être inclus en deuxième ligne mais aussi en deuxième et troisième ligne. En effet, si le patient qui a progressé dans les 6 mois a reçu une autre ligne de traitement, il pouvait être inclus. L’analyse en sous-groupes suggère que le nivolumab s’est montré efficace à chaque ligne de traitement.

Un point majeur est l’analyse des biomarqueurs. Alors que pour être inclus, il était nécessaire d’envoyer un échantillon, seul la moitié ont pu être exploités correctement. Ainsi seule la moitié des patients a un statut PDL1 et p16 (HPV) connus. Les patients PDL1+ bénéficient fortement du nivolumab alors que pour les patients PDL1- (en réalité, expression inférieure à 1%) n’ont pas de bénéfice, sans que dans ce dernier cas la courbe du nivolumab soit inférieure à celle de la chimiothérapie. De même les patients p16 bénéficient fortement du nivolumab alors que pour les p16 négatifs, les courbes sont superposables. Une analyse conjointe montre que seuls les patients qui ne bénéficient pas du traitement sont les patients négatifs à la fois pour PDL1 que pour p16.

Cette étude bien menée ouvre de très nouvelles perspectives dans les cancers ORL avec l’immunothérapie. Les travaux futurs portent sur la place de l’immunothérapie : en première ligne ? seule ? en association avec d’autres immunothérapies (anti-CTLA4 par exemple) ou une chimiothérapie ? En association avec une radiothérapie ou une chimiothérapie d’induction pour les tumeurs localisées ?

Lessons From Large-Scale Collection of Patient Reported Outcomes : Implications for Big Bata Aggregation and Analytics. Sloan IJROBP Vol. 95, No. 3, pp. 922, 2016

Un PRO (Patient Reported Outcome) est défini par la Food and Drug Agency (FDA) comme une donnée directement générée par le patient concernant son état de santé et son traitement en utilisant lui-même un outil de mesure. Ces données permettent de réaliser un instantané de l’impact du cancer sur la globalité de l’individu à travers les symptômes physiques, la toxicité du traitement, les difficultés psychosociales ou la qualité de vie.

Sloan et coll. rapportent l’usage de la mesure d’un item de qualité de vie généré par les patients dans le réseau Mayo Clinic qui a débouché sur une utilisation quotidienne. Dans cette étude portant sur les résultats de 23 essais thérapeutiques sur différents cancers, un score bas au diagnostic était un facteur pronostique important avec une multiplication par deux du risque de décès à 1, 2 et 5 ans. Grâce à une échelle modifiée évaluant la fatigue et la douleur intégrée dans la pratique clinique, 30 000 patients l’ont utilisé entre 2010 et 2015, et plus de 20% des patients ont rapporté une diminution de leur QDV débouchant rapidement sur une intervention clinique. La grille Linear Analog Self- Assessment (LASA) est une autre grille d’autoévaluation sur la QDV, la douleur et l’asthénie. Dans l’expérience rapportée par Sloan et al., en cas de diminution de leurs indices, les patients traités pour un cancer de la prostate étaient vus par un soignant qui adressait le patient au service approprié. La durée de consultation médicale a augmenté de 4 minutes. Plus de 90 % des patients et des médecins ont approuvé ce système leur permettant d’améliorer la communication réciproque. Après avoir participé à ce protocole la douleur moyenne mesurée sur la grille LASA, toutes les dimensions ont été améliorées. Cette méthode de PRO permettrait de détecter des altérations de la qualité de vie qui n’étaient pas identifiables par les médecins.

Leur utilisation est plutôt bien reçue par les patients et les soignants et plutôt que d’être un obstacle permet une meilleure communication. Les outils (tout du moins en langue anglaise) et les recommandations ont été décrits. À condition que le patient l’accepte, la production d’information par l’utilisation des PRO peut être fréquente et en continue sur la durée de prise en charge. Les informations rapportées par les patients peuvent être standardisées et intégrées avec d’autres sources dans des bases de données gigantesques (les « big data ») ouvrant la voie à une médecine personnalisée.

Y. POINTREAU, Le Mans
J. FAYETTE, Lyon
S. GUIHARD, Strasbourg